Covid-19 et assemblées générales : l’ordonnance dévoilée

La réaction du gouvernement était attendue devant le vide juridique laissé par l’expiration de l’ordonnance du 25 mars 2020. C’est chose faite avec une prorogation des dispositions modifiées au 1er avril 2021 assortie d’une possibilité d’allongement au 31 juillet.
Image

Près de huit mois se sont écoulés depuis la mise en place du régime d’exception entourant les règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants des sociétés, les diverses mesures adoptées par l’ordonnance n°2020-321 du 25 mars 2020 ont heurté certains principes cardinaux du droit des sociétés et notamment les droits des actionnaires exercés en assemblée générale.

La prolongation de ces mesures par le projet d’ordonnance a conduit à de vives discussions ces dernières semaines et son examen tardif par le Conseil d’Etat a entraîné à une situation inédite puisqu’un vide juridique s’est installé depuis le 30 novembre dernier.

En réaction, le gouvernement a publié, sur le fondement de la loi n°2020-1379 du 14 novembre 2020 dont l’article 10-I, 1° l’autorise à adapter et proroger certaines ordonnances dont celle portant le n°2020-321 du 25 mars 2020, l’ordonnance n°2020-1497 du 2 décembre 2020.

D’applicabilité immédiate, celle-ci proroge la durée d’application de l’ordonnance n°2020-321 du 25 mars 2020 jusqu’au 1er avril 2021, étant précisé que plusieurs prorogations additionnelles pourront être adoptées par décret en Conseil d’Etat jusqu’à une date ne pouvant dépasser le 31 juillet 2021.

Au-delà d’une simple prorogation et en réponse aux critiques, le nouveau texte apporte certains changements qui méritent d’être soulignés :

  • La généralisation de l’absence de nullité des assemblées pour défaut d’envoi par voie postale des convocations

L’ordonnance étend la possibilité de se passer de l’envoi des convocations par la voie postale, sous réserve que des raisons extérieures à la société justifient ce choix, à l’ensemble des personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé.

  • La restriction des motifs permettant l’organisation d’une assemblée à huis clos

La principale attente des actionnaires était la modification substantielle, voir la suppression, du huis clos alors que de son côté le gouvernement souhaitait prévenir l’apparition de clusters en assemblée générale. Si le huis clos a été maintenu, il n’est désormais possible que dans les cas dans lesquels « à la date de la convocation de l’assemblée ou à celle de sa réunion, une mesure administrative limitant ou interdisant les déplacements ou les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires fait obstacle à la présence physique à l’assemblée de ses membres ». Cette approche plus concrète prend en compte de nouveaux paramètres tels que la capacité d’accueil des actionnaires dans le respect des règles sanitaires ou le nombre de membres qui ont l’habitude d’assister à l’assemblée. 

Spécifique aux sociétés cotées cette fois, l’ordonnance prévoit que celles-ci ont l’obligation de retransmettre en direct l’assemblée générale (sauf raisons techniques impérieuses) et d’en assurer la rediffusion en différé. De plus, les questions écrites posées par les actionnaires et les réponses apportées par les dirigeants devront obligatoirement être publiées sur le site de la société.

  • La facilitation du recours à la consultation écrite des associés et au vote par correspondance

Dans la même lignée, l’ordonnance encourage l’utilisation de la consultation écrite des associés en prévoyant l’usage pour l’ensemble des sociétés et groupements, à l’exception des sociétés cotées. Les conditions du vote par correspondance sont également aménagées et portent sur tout type de société ou groupement.

  • Les conditions de basculement entre les formes de consultation des associés modifiées

Par souci de cohérence, l’ordonnance a aligné l’information des actionnaires du choix d’un changement de format de l’assemblée générale à un délai de 3 jours.

Camille PEDRINI
Louis BOUTAN